« Les îles du Pacifique sont un paroxysme du concept de point chaud (« hot spot ») combinant haute originalité de la flore et de la faune et fortes pressions anthropiques », c’est en ces termes que le Comité français de l’UICN (2003) présente la biodiversité de la Polynésie française. Car oui, derrière les paysages de carte postale que nous avons tous en tête, la diversité du vivant se meurt.
A gauche : Fleur de Sclerotheca raiateensis, endémique de Polynésie, en danger critique d’extinction ; à droite : Fleur de Fitchia nutans, endémique de Polynésie, en danger d’extinction. © Jean-Yves Meyer
Tout d’abord, plantons le décor. Les quelques 120 îles de Polynésie française se répartissent en 5 archipels : l’archipel des Marquises, l’archipel de la Société, l’archipel de Tuamotu, l’archipel des Australes et l’archipel des Gambiers (Florence, 1997 ; Stratégie pour la biodiversité de la Polynésie française, 2006). Situées à plus de 5000 kilomètres du continent, cet isolement a permis à l’évolution des espèces de suivre son propre chemin, en dehors de l’influence des continents. Au cours de millions d’années d’évolution, sont apparues plus de 551 plantes endémiques alors que le territoire abrite un total de 885 espèces indigènes (Gargominy et al. 2019, voir aussi Florence et al. 2019). Ce taux d’endémisme de 62% est parmi les plus importants au monde. Ces espèces ne se retrouvent nulle part ailleurs, ont une forte valeur patrimoniale et la France a une responsabilité exclusive pour les conserver.
Cependant, alors que de nombreuse espèces endémiques sont déjà vulnérables du fait de la petite taille de leur population, les pressions sur cette flore unique sont nombreuses. La première d’entre-elles sont les espèces invasives qui, dans le cas des plantes introduites, entrent en compétition pour les ressources avec les espèces natives, ou dans le cas des animaux introduits, induisent une forte pression d’herbivorie ou de prédation des graines (Meyer & Butaud, 2009 ; Dufay et al. 2015).
Les changements d’occupation du sol dus majoritairement à l’urbanisation et l’agriculture entraînent une importante perte d’habitat et rapprochent certaines espèces de l’extinction. La surexploitation des ressources et le changement climatique sont aussi des facteurs impactant la survie des espèces.
Ces fléaux pour la biodiversité font de la Polynésie française le territoire d’outre-mer comportant un des plus grands nombres d’espèces éteintes ou menacées de toutes les collectivités de l’outre-mer français. Parmi les plantes endémiques, près de 2/3 sont menacées d’extinction (Dufay et al. 2015).
Exemple de plante envahissante à Tahiti : le terrible Miconia ! © Jean-Yves Meyer
Votre mission si vous l’acceptez, sera une contribution à la sauvegarde du vivant de la Polynésie française, un vivant unique au monde, mais un vivant menacé. Votre équipement dernier cri ne sera pas une montre-grappin ou une voiture amphibie mais… des planches d’herbiers.
En effet, beaucoup de connaissances se cachent dans la mémoire des feuilles d’herbier et le Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) dispose de la plus grande collection de plantes séchées au monde, accumulée depuis de nombreux siècles. Ces connaissances sont essentielles pour comprendre l’évolution de la flore au cours du temps, la préserver et mettre en place des actions de conservation. L’herbier du MNHN conserve plus de 5000 spécimens d’espèces endémiques de Polynésie française, mais 4000 gardent encore leur secret bien caché, et parmi elles de nombreuses espèces que l’on pourrait bien ne plus jamais retrouver sur Terre.
Nous attendons donc que cette mission Herbonaute nous apprenne beaucoup sur la flore de Polynésie française, en vue de la protéger.
A gauche : Fleur de Fuchsia cyrtandroides, endémique ; à droite: Fleur de Psychotria paulae, endémique © Jean-Yves Meyer
Cette mission, proposée dans le cadre de l'appel à projets 2020, est proposée par Simon Véron, Carlos Rodrigues et Elise Lebreton pour le projet Flore endémique des Territoires d’Outre-Mer (FEnTOM).
Références
> Ministère du développement durable, chargé de l’aménagement, de l’environnement de la qualité de la vie, et de la prévention des risques naturels (2006). Stratégie pour la Biodiversité de la Polynésie française.
> Dufay et al. (2015). La liste Rouge des espèces menacées en France. Flore endémique vasculaire de Polynésie française.
> Florence J. (1997), Flore de la Polynésie française Vol.1
> Chevillotte H., Florence J., Ollier C. & Meyer J.-Y. (2019). Base de données botaniques Nadeaud de l'Herbier de la Polynésie française (PAP). Institut Louis Malardé, Délégation à la Recherche, Papeete, Tahiti. http:///nadeaud.ilm.pf
> Gargominy, O., Tercerie, S., Régnier, C., Ramage, T., Dupont, P., Daszkiewicz, P. & Poncet, L. 2019. TAXREF v13, référentiel taxonomique pour la France : méthodologie, mise en œuvre et diffusion. Muséum national d’Histoire naturelle, Paris. Rapport Patrinat. 63 pp.
> Meyer, J. Y., & Butaud, J. F. (2009). The impacts of rats on the endangered native flora of French Polynesia (Pacific Islands): Drivers of plant extinction or coup de grâce species?. Biological invasions, 11(7), 1569-1585.
Illustrations A MAJ:
- Vignette : Psychotria paulae, endémique © Jean-Yves Meyer
- Panorama : Fleur de Sclerotheca raiateensis, endémique de Polynésie, en danger critique d’extinction © Jean-Yves Meyer
- Dans le texte : Destruction d'un habitat à Tahiti (surpâturage, incendies, déforestation) © Jean-Yves Meyer
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